vendredi 12 septembre 2014

Billet sur l'emploi en région

L’emploi en région, du concret!

Aujourd’hui encore il est vrai de dire que les ressources naturelles ou plus largement le secteur primaire conditionne et rythme le marché de l’emploi dans l’ensemble des régions du Québec. L’agriculture est omniprésente dans la vallée du Saint-Laurent et les secteurs de la forêt et des mines génèrent un nombre important d’emplois au nord du fleuve. Dans les deux cas et dans bien d’autres secteurs qui y sont apparentés, on croise des gens que l’on pourrait qualifier de pragmatiques parce que leur emploi s’appuie sur du concret. Ce constat peut paraitre sans intérêt, simpliste même, mais dans un monde où l’instrumentalisation et la spéculation sont devenues les axes du bonheur, de replonger les mains dans la terre ou à tout le moins de rencontrer ceux qui le font encore quotidiennement est pour le moins salutaire.

Pour beaucoup de jeunes que je rencontre en région, l’emploi n’est pas seulement un salaire, voie d’accès à la consommation ou l’incarnation d’un statut social, c’est surtout une façon de pouvoir continuer à vivre à proximité de la famille et des amis. C’est aussi une façon de pouvoir habiter un endroit, un lieu qui leur est cher ou qui correspond à certaines valeurs importantes. C’est en partie pour ces raisons que l’on parle de drame lorsqu’une usine ferme ses portes en région (Résolu, Cascade, Électrolux, etc.). Et le drame est double voir triple. D’abord, il y a le choc de perdre son gagne-pain avec tout ce que cela implique puis il y a l’angoisse de devoir s’expatrier loin de son milieu de vie pour continuer à subvenir à ses besoins. Bien entendu, il s’agit d’une situation lourde de conséquences qui peut toucher chacun d’entre nous. Pour l’urbain toutefois, la probabilité de retrouver un emploi décent dans un rayon raisonnable demeure plus importante. Enfin, il y a l’impact direct sur la collectivité, par exemple l’offre de services de proximité, menacée par une spirale de dévitalisation (Via, Orléan, Post Can.).

Les dernières nouvelles entourant la fermeture de l’usine Cascades d’East-Angus et plus récemment de l’usine Résolu de Shawinigan, peuvent laisser perplexe quant à l’avenir du marché de l’emploi et de la pérennité de certaines régions. Dans un registre à peine plus positif, le ministère de l’Emploi prévoit une croissance modeste du marché de l’emploi dans le futur. Pourtant, certaines personnes, groupes ou entreprises parlent de pénurie de main-d’œuvre laissant entendre que les perspectives d’emplois sont plutôt bonnes pour les jeunes en région. Pas évident de s’y retrouver! Dans les faits, il s’agit d’une question de segmentation du marché de l’emploi en région. En effet, pour beaucoup de communautés, des besoins importants de main-d’œuvre, généralement qualifiée, se font sentir.

En réalité, on est en train d’assister à ce que certains ont qualifié de désindustrialisation, d’autres ont parlé de modernisation. Dans tous les cas, il s’agit d’une « tiercerisation » i.e. que l’économie des régions, principalement composée des secteurs primaire et secondaire, intègre de plus en plus du secteur des services. En même temps, les trois secteurs vivent une complexification scientifique ou technique qui nécessite davantage de qualifications pour faire le travail. Inutile de dire à quel point la question de l’éducation et particulièrement celle de l’éducation postsecondaire et professionnelle en région est cruciale.

Est-ce à dire que je vais rencontrer de moins en moins de ces mains terreuses, éminents pragmatiques solidement enracinés dans la réalité, dans un Québec de plus en plus virtuel??? Rien n’est moins sûr. Peut-être en nombre, mais certainement pas en qualité. Cette relation privilégiée à l’espace et au temps est certes un héritage qui se transmet de génération en génération, mais comme un bon rhume, c’est aussi quelque chose qui s’attrape dans la proximité. En attendant de tous attraper ce mal nécessaire, en fin de semaine avaient lieu les portes ouvertes de l’UPA. Des centaines d’entreprises agricoles ouvraient leurs portes pour montrer aux gens comment fonctionne une ferme, et dans certains, cas expliquer que le contenu de notre burger a déjà brouté paisiblement par ici bref, que la nourriture ne tombe pas du ciel, sauf peut-être pour les pomiculteurs.

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